mercredi 30 mai 2007

Un début



Bonjour,

Créer un blogue n'est pas tout, encore faut-il avoir quelque chose digne d'être raconté. Il ne faut pas seulement prendre la parole, il faut être capable de l'enrichir.

Mais, toute bonne première rencontre commence par des présentations. Mon nom est François Morin, je vis à Montréal et j'ai maintenant 40 ans. Ce blogue se nomme "Chroniques d'altitudes" pour deux raisons : premièrement, j'aime la montagne et j'en ai quelques-unes à mon actif, des montagnes comme le Kilimandjaro (5895 m) et des plus importantes comme l'Aconcagua (6962 m)


Ça c'est le début que j'ai écris il ya déjà quelques semaines et je procrastinais sur le reste du message, mais bon aujourd'hui l'actualité m'a ratrapé et je commence donc différeement.

J'allais donc ajouté que ce blogue parle d'altitude,mais aussi d'attitude car grimper des montagnes à une signification différente pour moi parce que, il ya quelques années, j'étais très obèse, mais vraiment très très obèse et ce blogue se voulait un peu une façon de transmettre un peu de cette expérience acquise en prenant mon gros problème en mains.

Ce matin cependant l'actualité me pousse à l'action, on annonce en effet la création d'une coalition contre l'obésité morbide (www.lepoidsquitue.com) qui veut faire la promotion de la chirurgie comme solution à l'obésité morbide, et ça me mets hors de moi, voici ma réaction.

La chirurgie n’est pas une panacée à l’obésité morbide

Je n’ai pu que ressentir un bien grand malaise en apprenant que l’on avait créé une coalition contre l’obésité morbide qui visait à faire la promotion de la chirurgie bariatrique (chirurgie du système digestif) comme étant «La» solution à l’obésité morbide. Un grand malaise d’abord de voir que l’on peut militer pour la chirurgie comme solution unique au problème de l’obésité morbide et un malaise aussi parce que j’ai moi-même souffert d’obésité morbide extrême (plus de 190 kg avec un indice de masse corporel supérieur à 60) et que je comprends bien la profondeur de la détresse et de la vulnérabilité que l’on peut ressentir quand on est obèse morbide.

J’ai bien connu la douleur de ne pouvoir marcher plus de dix pas sans être essoufflé, de prendre plus de 15 minutes pour grimper un seul étage et s’est sans parler de vivre sous le regard réprobateur des gens comme si on était une espèce de bête de cirque. Cependant, quand j’entends des gens, surement bien intentionnés, faire la promotion de la chirurgie comme étant «La» solution je n’entends pas un message d’espoir, mais un cri de désespoir et de découragement.

Le désespoir et le sentiment d’être incapable d’agir sur son propre état, d’être impuissant face à ses problèmes de poids, un découragement qui ne peut être qu’amplifié par la promotion active de la chirurgie. Le message véhiculé est clair : vous n’avez pas de pouvoir sur vous-même, seule la chirurgie peut vous aider.


Bien entendu nous ne sommes pas tous égaux devant la prise de poids, certains engraissent beaucoup plus facilement que d’autres et nous connaissons tous des gens qui mangent en grande quantité sans prendre un gramme, c’est peut-être injuste quelque part, mais le jour où on se retrouve obèse ça ne change rien aux faits : ce n’est pas le voisin qui doit maigrir, c’est soi-même, la justice ou l’injustice de la situation n’ont rien à y voir. Je ne veux surtout pas culpabiliser les obèses morbides, de nombreux facteurs familiaux et sociaux encouragent la prise de poids et c’est loin d’être entièrement de leur faute s’ils sont obèses. Mais si la prise de poids n’est pas de leur faute, maigrir demeure leur responsabilité et pour ce faire il existe beaucoup de solutions dont la vaste majorité réside dans une alimentation plus saine, plus d’activité physique et l’adoption d’une meilleure hygiène de vie.


Je ne parle pas de vivre une vie plate remplie de festins de crudités moroses, je parle d’une alimentation variée, savoureuse que l’on déguste avec un plaisir constamment renouvelé, je parle d’une vie aussi que l’on savoure. Je parle aussi du plaisir de se sentir fort, en forme et actif, que son propre corps redevienne une source de satisfactions et de bien-être plutôt qu’une source de douleurs et de honte. Imaginé un peu, quelques secondes seulement, la satisfaction que j’ai pu ressentir en janvier dernier alors que je me tenais au sommet de la plus haute montagne des Amériques, l’Aconcagua alors qu’il y a moins de dix ans je ne pouvais même grimper un étage sans me reposer trois fois.


Entre les deux je ne me suis pas fait opéré et il n’y a pas eu de miracle, je n’ai pas changé de génétique ou de prédisposition naturelle à l’obésité et je ne ne suis pas devenu un être d’une volonté de fer, si je l’avais été je ne me serais jamais rendu à plus de 190 kg, mais, par contre, après avoir été endurant, je suis devenu persévérant. Après avoir enduré les malaises, la douleur et les maladies pendant des années j’ai décidé de consacrer toute ces énergies perdues à en faire de la persévérance et, croyez-moi, c’est beaucoup plus facile.


La chirurgie bariatrique fait partie des solutions, mais elle est et doit rester une solution de dernier recours qui, oui, reste nécessaire pour certaines personnes et c’est bien vrai que l’obésité tue : l’obésité n’est pas une façon de vivre, c’est une façon de mourir. Cependant la première personne qui peut changer les choses ce n’est pas le chirurgien, c’est l’obèse lui-même. Faire la promotion de solutions remettant la responsabilité première de la perte de poids en d’autres mains que celle de la personne qui a le problème de poids est un leurre, même pour des gens extrêmement obèse.


Oui c’est difficile, oui c’est décourageant et les excuses ne manquent pas pour renoncer, mais, si le défi est immense, la récompense est encore plus grande. De plus, cette prise en mains par soi-même à un avantage incroyable : on n’a pas besoin d’être inscrit sur une liste d’attente pendant des années, on peu commencer dès maintenant.