mardi 28 août 2007

L'amitié, partie 1

Quand j’ai entrepris ce blogue , je m’étais bien promis de ne parler que de deux sujets : les montagnes et l’obésité qui sont, pour moi, deux sujets liés. Aujourd’hui j’en ajoute un troisième, l’amitié, mais en aparté seulement, comme une courte parenthèse.

L’amitié, et donc les amis, sont pour moi très importants. Tout le long de ma jeunesse j’ai ressenti désespérément le besoin de me reconnaître et de rejoindre mes semblables malgré mon problème d’obésité qui faisait de moi souvent la risée de la cour d’école ou la cible, sinon la préférée mais du moins la plus lente, des terrocrates de la petite école. De ces années j’ai gardé un sens profond de la nécessité de la solidarité humaine, je n’en suis pas sorti amère, j’en suis sorti encore plus conscient du réconfort de l’amitié dans l’épreuve et de la multiplication de la joie qu’elle amène dans le succès. Je ne suis pas un solitaire, je suis un solidaire.

C’est pourquoi je considère important d’avoir fait participer d’autres personnes à mes entreprises de montagne, malgré que ce n’est vraiment pas facile et que j’ai trop souvent accumulé des frustrations et des tensions avec des amis, souvent par ma faute d’ailleurs. Nous avons fait des projets communs, mais chacun y a mis un désir, un objectif, individuel et, parfois, ceux-ci sont conflictuels avec le notre. La fin de mon dernier projet, à l’Aconcagua, m’a donné l’occasion de constater encore cela et je me suis rendu compte qu’il y avait très peu de ces gens avec qui je resterais en contact à moyen terme, je ne sens pas la connexion, nous avons vécu des émotions intenses, mais je ne sais pas si demain, la semaine prochaine, ou le mois prochain, j’aurai quelque chose en commun avec eux.

Cette constatation m’a donné l’occasion et la volonté d’éclaircir une question que je me posais depuis longtemps. Il y a 22 ans je suis allé faire le coopérant en Afrique de l’ouest avec une bande de jeunes enthousiastes comme moi qui, à l’aube de nos 20 ans, voulions changer le monde. Je me souviens très bien de cette fraternité que nous ressentions, des joies que nous avons partagées, des difficultés aussi. En revenant nous nous étions jurés de ne jamais perdre le contact, de ne pas nous oublier, d’être des amis pour la vie. Et la vie nous a lentement séparés, cette amitié durable que nous nous promettions dura parfois seulement quelques mois, parfois quelques années et je crois bien avoir perdu le contact avec le dernier il y a une quinzaine d’années. Nous nous étions rejoints dans l’exceptionnel et nous ne parvenions pas à nous retrouver dans l’ordinaire de nos vies, nous n’avions pas, à cette époque, des intérêts autres en commun pour nourrir l’amitié et l’intérêt longtemps.

Mais, parfois, j’étais nostalgique de ce temps et je me demandais ce qui avais bien pu advenir de mes amis. Que restait-il de ce que nous avions vécu? Est-ce que maintenant que mes cheveux avaient pris du gris, est-ce que je comprendrais mieux ce passé en retrouvant ces amis, est-ce que je comprendrais mieux ce qui nous séparaient? Je me suis donc mis à l’ouvrage et j’ai entrepris de retracer ces gens dont je n’avais parfois aucune idée de ce qu’ils avaient pu devenir.

Et, grâce à Google, entre autres, et un peu de bonne mémoire, j’en ai retrouvé plusieurs. J’en ai même retrouvé un à deux coins de rues de mon travail alors que je le croyais à l’autre bout du Canada. Il m’en reste à retrouver, mais déjà la semaine prochaine nous sommes quelques-uns à aller prendre un verre pour chacun se voir dans le miroir de nos souvenirs. 22 ans plus tard, qu’avons-nous fait de nos rêves, qu’avons-nous fait de nos passions. Je vous raconterai.

2 commentaires:

Mazz a dit…

C'est un des drames de la vie de voir des chemins, pourtant si intenses un moment, se séparer un jour et se perdre de vue.

La vie nous bouffe, comme elle bouffe tout. Et elle s'en fou. Nos rêves d'un monde qu'on referais s'estompent, jaunis pas le temps, puis s'effritent, desséchés par manque de larmes. Nos passions même finissent pas s'endormir, ce en quoi on croyait tant, ce pour quoi on voulait vivre, et même mourir.

Sur le long fleuve tranquille, nous fermons les yeux et notre esprit. Sur une mer agitée, nous prenons refuge dans notre égoïsme et nous nous refermons. Et dans les deux cas, on oublie d'où on vient.

L'âge a quelquefois cette propriété qui fait qu'un événement, une odeur, une couleur ou un son catalyse une idée. L'idée en appelle une autre, puis c'est un souvenir flou, un visage, une vibration. Et le chemin depuis longtemps oublié éclaire la nuit dans lequel nous nous sommes enfoncés depuis trop longtemps. Les rêves d'autrefois nous reviennent à l'esprit jusqu'au plus profond de l'âme et on se pose alors les questions qui brûlent: Qu'ai-je fait de ma vie? Qu'ai-je fait de mes amis? Qu'ai-je fait du Monde?

J'avais pourtant tant d'espoir en qui j'étais, en qui je voulais être. Mais je n'ai pas été à la hauteur. Et c'est peut-être une des raisons pour laquelle je préfères ne pas répondre aux appels provenant des chemins de mon passé. Pour ne pas confronter mes rêves d'alors et mes amis avec lesquels je les ai rêvés. Pour ne pas les décevoir.

François, tu as vraiment de quoi être fier. Tu as vaincu ton obésité et tu inspires les autres. Puisse cette rencontre que tu organises ne pas être un point d'arrivé mais un départ.

- Mazzaroth

François a dit…

Je sens que l'on va avoir une bonne conversation là-dessus Mazz.